Nantes, sur le plan de la restauration gastronomique, n’est pas une ville facile. Faiblement touristique, la ville a surtout comme ressource la clientèle locale qui n’aime pas changer ses habitudes et qui a perdu sa restauration double étoilée il y a quinze ans. Plusieurs chefs de talent n’ont pas pu s’y implanter durablement. Le très doué japonais Sigeo Toregaï a dû jeter l’éponge après dix années de vaine lutte. Lorsque Laurent Saudeau est venu s’y établir dans la maison familiale (qui n’était pas un restaurant), située dans une commune de l’agglomération, sa réussite était loin d’être programmée. Laurent avait pour lui d’être originaire de la région et d’offrir un cadre chaleureux dans une belle maison bourgeoise environnée d’un beau parc. Mais il choisit l’option difficile : celle de faire apprécier sa cuisine, totalement élaborée dans sa formation méditerranéenne. Une cuisine de goûts marqués, de saveurs qui claquent, où l’on reconnaît une grande habitude de manier les épices. Les originalités de Sigeo Toregaï avaient effrayé les Nantais. Celles de Laurent Saudeau ont su les charmer.
Cinq années d’évolution profonde
La rencontre d’un chef et de sa clientèle locale relève en partie du mystère. Dans cet accord chef-clientèle, Nantes y a beaucoup gagné : une locomotive qui transforme l’image trop stéréotypée de la cuisine nantaise.
On retrouve là le décapage effectué par Michel Sarran à Toulouse : à savoir imposer un virage contemporain à une clientèle