Le dernier en date des ouvrages écrits par un critique gastronomique, relatant ses expériences et les visions qu’il a de la restauration, a pour titre Bon appétit, messieurs, et il est l’oeuvre d’un journaliste du magazine Elle, au pseudonyme de Léo Fourneau. Comme tous ceux émanant de ses collègues, il part d’idées préconçues et de beaucoup de naïveté économique.
La première étant que la gastronomie doit être accessible à tous. Un peu comme la Sécurité sociale devant apporter les meilleurs soins médicaux à la totalité de la population. Cette idée est en général accompagnée du mythe d’un âge d’or où les plus modestes avaient accès aux meilleurs produits. Partant de ce passé rêvé, qui n’a jamais existé, toute manifestation de la haute cuisine paraît alors être une déviance de l’esprit original d’une cuisine d’exception faite pour tous. L’histoire des campagnes au XIXe siècle, lorsqu’elle est menée sérieusement, montre qu’il n’y a eu de cuisine exceptionnelle que pour ceux qui pouvaient la payer, c’est-à-dire la bourgeoisie. Et le XXe siècle n’est venu atténuer les inégalités que de façon limitée. Quant à la classe ouvrière, elle n’a jamais eu accès de près ou de loin aux bons produits et aux mets délicats.
Doit-on payer
la gastronomie ?
Seconde naïveté que l’on retrouve chez beaucoup de critiques et de journalistes qui n’ont pas travaillé en entreprise, la surprise face à la rigueur de l’organisation hiérarchique dans les brigades de cuisine. La