
En 69, le film de Sydney Pollack « On achève bien les chevaux » mettait en lumière l’absurdité de la condition humaine. Avec le bilan du contrat d’avenir dans la restauration, le gouvernement remet ce thème au goût du jour en achevant ledit contrat.
Lors de sa conférence de presse, le 23 novembre, en présence des organisations professionnelles, la ministre Sylvia Pinel a pourtant déclaré que « le bilan du contrat d’avenir n’était ni blanc ni noir (…). J’ai souhaité le maintien du secteur au taux de TVA intermédiaire. (…) Nous avons annoncé le taux de TVA à 10 % car nous ne souhaitions pas entretenir d’incertitudes (…). Nous ne voulons pas perdre le bénéfice des résultats du contrat d’avenir mais changer de méthode ».
Le propos semblait encourageant et aurait dû promettre à la profession des lendemains qui chantent. Certes, nous avons réchappé à l’augmentation pressentie du taux à 20 %. Mais, les restaurateurs récolteront néanmoins au 1er janvier 2014 un taux rehaussé à 10 %. Première fausse note puis changement de partition.
La ministre passe au chant du cygne : « Le contrat comportait trop d’erreurs. C’est un échec dû aux imprécisions et à des indicateurs non-mesurables. Il a été rédigé à des fins politiciennes pour justifier des mesures vis à vis de l’opinion publique ».
Quid des efforts fournis jusqu’ici par les restaurateurs sur les prix, l’emploi et l’augmentation des salaires ? Réponse (surprenante) dans le rapport de 79 pages présentant le bilan du contrat d’avenir.
Sur le volet Baisse des Prix, on y apprend que 55 % des établissements ont appliqué des réductions de prix sur au moins 7 produits. Selon l’enquête de la DGCCRF, ces chiffres correspondent à une baisse moyenne des prix de 4 % entre juillet et décembre 2009. Au-delà de cette période ? Mystère et boule de gomme puisque l’administration n’a pas jugé utile de poursuivre ses relevés.
Mais heureusement, l’indice des prix réalisé par l’INSEE a permis une estimation. Résultat ? C’est le zéro pointé aux vilains restaurateurs. Car, au terme de la durée du contrat d’avenir, soit le 30 juin 2012, la baisse n’a été que de 1,28%, donc en dessous des objectifs fixés à – 3,15%. On oublie qu’entre temps, les restaurateurs ont essuyé les plâtres d’une hausse de 1,5 %.
Côté emploi, « les résultats sont en dessous des attentes en matière de formation, avec 3 800 nouveaux apprentis contre les 20 000 promis », faute de place en centres de formation. Doit-on rejeter la faute sur les restaurateurs ? Non, nous a rassuré la ministre puisque « 50 000 emplois ont été créés ». Un solde, soit dit en passant, supérieur aux objectifs fixés par le contrat d’avenir.
Enfin, sur la rémunération des salariés, bonne nouvelle : « les minimas conventionnels ont été revalorisés ». Mauvaise nouvelle, indique le rapport : « (…) dans la pratique, il existe toujours un retard dans l’application de cet engagement : le salaire conventionnel observé est toujours inférieur au SMIC ».
Mais heureusement, nous dit-on, l’heure est au dialogue et à la création d’un comité stratégique prévue au premier trimestre 2013 et composé de 50 à 60 membres issus des syndicats patronaux, d’organismes représentatifs de salariés, de parlementaires, d’élus locaux, de consommateurs, fournisseurs, ou encore d’artisans des arts de la table. Ce dernier aura pour mission d’établir une feuille de route sur 5 ans.
Encore un « comité Théodule » qui s’il est honnête pourra confirmer, avec bons sens, que les difficultés de la profession sont comme pour toutes les entreprises en France : trop de charges, trop d’impôts, trop de normes, trop de difficultés à recruter, trop de difficultés à licencier, trop d’harcèlements administratifs, … enfin tout ce que tout patron constate au quotidien, l’empêchant de faire vivre et développer son entreprise.
Francis Luzin
Directeur de la publication