
De la transparence. Tous la réclament en toutes choses, de la politique au système bancaire en passant par les médias. Depuis plusieurs mois, c’est au tour de l’hôtellerie-restauration, avec une première victoire remportée lors de la récente condamnation des sites Web Expédia et TripAdvisor.
Mais la transparence de l’assiette au restaurant, portée, le 3 octobre dernier, par l’adoption de l’amendement Fernand Siré au projet de loi renforçant la protection de l’information du consommateur relève plus du domaine de l’impossible.
Car, pour rendre obligatoire la mention de l’usage de produits frais au restaurant, encore faudrait-il pouvoir distinguer ce qui est frais ou brut de ce qui ne l’est pas. Attention à l’amalgame du mode de conservation d’un produit (frais vs surgelé, ou sous-vide) et son degré élaboration.
La loi qui soit disant souhaite répondre à la demande légitime du consommateur ambitionne de préciser les « conditions d’élaboration des plats ». Mais comment définir le début et la fin de l’intervention du chef sur ses produits ? Pour évangéliser la profession autour de ce projet, le député Fernand Siré s’est rendu au Synhorcat le 1er décembre pour demander à la profession de définir les termes du futur arrêté. Autant inciter les professionnels à fabriquer la corde qu’ils se passeront au cou.
Car, si l’esprit de la loi ambitionne d’informer le consommateur à grand renfort d’astérisques sur le menu, grand est le risque de rendre la lecture de la carte totalement sibylline. Bref, à vouloir tout embrasser, souvent, on étreint mal…
La transparence comme gage de sécurité et d’hygiène ? Tout a déjà été prévu en matière de réglementation. La transparence comme gage de qualité ? Un challenge impossible. Assigner une définition à la qualité, substrat de la loi, est un pari perdu d’avance. Une levée des boucliers est nécessaire si la profession ne souhaite pas se retrouver dans une impasse.
Certes, la restauration ne peut se permettre d’occulter des informations et de mettre le consommateur devant son assiette comme devant le fait accompli. Mais à la transparence et à la qualité coercitives, il serait préférable de se recentrer sur l’honnêteté.
Francis Luzin
Directeur de la publication