
A la suite de Marc Veyrat, Michel Bras, Jacques Chibois, Jean-Michel Lorain, Alain Passard et Olivier Roellinger, ont-ils vendu leur âme en signant un contrat d’assistance avec Sodexho, leader de la restauration collective ? Ont-ils vendu leur image artistique au géant de la restauration de masse ?
En dehors de l’aspect financier d’un tel contrat, nous y voyons davantage la matérialisation d’un concept qui nous est cher : la haute gastronomie n’a pas qu’une fonction élitiste. L’aristocratie se justifie socialement lorsqu’elle a une fonction d’amélioration des conditions de vie du plus grand nombre. Elle devient obsolète lorsqu’elle se referme sur elle-même.
Les grands chefs créatifs du groupe des six contribuent par la formation des chefs de collectivité (ceux qui ont en charge la nourriture de la population française) à l’amélioration des conditions de goût des Français. C’est la meilleure réponse au danger de dérive vers le fast-food à l’américaine qui guette la population.
Si la Semaine du Goût reste un événement très circonscrit dans la durée et l’espace, l’opération de formation des chefs de collectivité par les plus grands noms de la gastronomie française représente un véritable tour de force qui mérite d’être salué. Une intelligente symbiose entre le qualitatif et le quantitatif.
L’industrie de la confection est tirée par la création de la haute couture, et l’industrie automobile bénéficie de toutes les évolutions technologiques de la Formule 1 et des Rallyes. Il en sera de même pour la restauration de masse qui a tout à gagner d’un véritable transfert de technologie et de sens artistique que peut lui procurer un engagement significatif des chefs créatifs de la haute gastronomie.