
Depuis que, à juste titre pour la santé des gastronomes, la nouvelle cuisine, fondatrice de la cuisine moderne, a mis en garde les cuisiniers contre les sauces trop lourdes et trop épaisses, une habitude s’est créée de bannir toute sorte de sauces quel que soit le plat. Un peu de jus s’est substitué aux sauces, puis le jus est devenu purement décoratif avec de simples traits. Le cuisinier agit alors avec une certaine présomption, celle de penser que la texture de son produit va être tellement parfaite et surtout tellement moelleuse qu’il va se suffire à lui-même. En fait, de nombreux plats au visuel très étudié – le jus trop présent gêne l’ordonnancement du plat – souffrent d’une certaine sécheresse. Même si, sur les premières bouchées, celles qui correspondent au goûter du cuisinier, cette sécheresse n’apparaît pas, le manque d’élément aqueux mouillé devient gênant en deuxième partie de consommation. Combien de produits snakés à la plancha nécessitent des éléments d’accompagnement émoliants ? L’émulsion, jus ou sauce légère très foisonnée, réapparaît dans les plats contemporains mais presque comme une citation visuelle. Pourquoi ne pas systématiquement accompagner le plat d’une sauce, d’un jus ou d’une émulsion complémentaire dans une petite saucière. Cela permet de conserver la structure originale du plat et de doser selon l’envie individuelle du client. La sauce ou le jus ne peuvent pas disparaître presque totalement des plats sous faute d’en réduire la palette.