
Est-il encore possible de gagner sa vie dans un restaurant gastronomique ? Cette forme de restauration n’est-elle pas structurellement condamnée ? Ce sont ces questions lourdes de conséquences que se posent les chefs, les anciens comme les plus jeunes.
Et l’angoisse est plus forte chez les jeunes professionnels qui sont à la veille de s’endetter ou qui viennent d’investir lourdement et qui ne voient pas clairement le réel retour sur investissement.
Les coûts salariaux, directs ou indirects, n’ont pas cessé leur enchérissement.
Les relations interpersonnelles s’alourdissent et freinent l’efficacité de la direction des affaires. Les nouveaux salariés comptent davantage leur temps et leurs efforts et doivent être guidés et poussés en permanence. Leur manque de dynamisme vis-à-vis du travail a altéré leur formation.
De quoi décourager les plus vaillants qui s’aperçoivent que, même en attirant une bonne clientèle à un prix suffisamment élevé, ils ne se paient que faiblement. Que dire de ceux qui peinent à remplir leur salle.
Seule la passion désintéressée permet de continuer à s’investir autant.
En fait, la restauration gastronomique, à part quelques cas bien circonscrits dans l’espace ou dans le temps, n’a jamais été génératrice de richesse pour la plupart des chefs, car elle nécessite trop de personnel qualifié ainsi que des produits trop chers.
Pour cette raison, la course aux étoiles est rarement pavée d’or. La juste rémunération des efforts consentis se trouve davantage dans la brasserie, le bistrot ou autre forme de restauration de plus grande masse avec des préparations plus simples à confectionner. Mais il est plus difficile alors de vivre sa passion. Les grands poètes se sont rarement résolus à écrire des romans policiers et les philosophes à paraphraser Harry Potter.