
Au regard des 24 000 décès annuels du cancer du poumon, des 7 600 décès d’accidents de la route, et des 169 000 décès de maladie cardio-vasculaire, que représentent les potentiels 100 décès par la maladie de Kreutzfel-Jakob ?
Statistiquement peu de chose. Et pourtant, cette dernière cause de décès crée une panique retentissante. Comparable à celle concernant le Sida qui a tué 1287 personnes en 1998.
Dans les cas de Kreutzfel-Jakob et du sida, la peur vient du spectre d’épidémie, notion floue de mort cachée, proche des grandes peurs du Moyen-Age. Elle vient aussi de l’apparition soudaine d’une nouvelle cause de décès, cause qui n’a pas encore été banalisée comme les maladies cardio-vasculaires.
Devant cette panique, la réaction la plus rapide des autorités n’a pas été d’interdire les farines animales mais d’interdire la consommation des ris de veau. Et la grande
La gastronomie se trouve ainsi entraînée dans un triste paradoxe : alors qu’elle défend les produits sains et naturels, c’est elle qui est touchée par une mesure de lutte contre l’agriculture intensive. Preuve qu’elle ne sait pas défendre son image et se différencier des autres formes de restauration hors foyer et au foyer. Comme si on interdisait de consommer de l’alcool dans les restaurants parce qu’il y a trop de morts au volant. Il faut reconnaître que cette mesure ubuesque a effleuré l’esprit de plus d’un technocrate de la santé. Il n’en reste pas moins que le silence de la gastronomie dans cette crise qui aurait dû mettre en valeur ses qualités et la faire paraître comme une autorité morale est à déplorer et à mettre au compte de l’inorganisation unitaire de la profession.