
« Soyez modernes ! »
L’injonction trouve écho dans les nouvelles technologies. Internet : le porte-drapeau de cette modernité à laquelle il faudrait adhérer comme une moule ou une huître. Désormais, on vous annonce que l’eldorado vous attend si vous faites vos courses sur restomarket.fr (site de e-commerce pour les restaurateurs et nouveau-né de l’année 2013). Et on vous promet monts et merveilles si vous êtes référencés sur des sites censés faire votre promotion mais acceptant, en parallèle, de publier des avis de (faux ?) consommateurs jetant l’opprobre sur votre établissement.
Phénomène pire encore : la recrudescence (La Fourchette, Groupon, thecadeau.fr…) de promotions affichant des remises de 70 % sur des menus. Pour le consommateur, l’offre peut, certes, s’avérer alléchante. Quant au restaurateur, on tente de lui faire croire qu’une table à prix cassé, c’est quand même toujours mieux qu’une table vide.
Et le contexte économique qui se durcit aide grandement ces sites à faire avaler des couleuvres aux professionnels de la restauration.
Il faut pourtant dénoncer ces sites hâbleurs dont le raisonnement est dangereux. En effet, engranger un peu de volume avec une marge dégradée voire inexistante n’a jamais contribué à améliorer la rentabilité moyenne d’un établissement. Pratiquer le grand écart des prix n’est pas cohérent avec les coûts d’un restaurant. Les tarifs d’une carte s’élaborent en fonction des services et de la typologie des clients. Moduler les prix, oui mais avec modération et ponctuellement.
Par ailleurs, c’est au restaurateur-patron qu’il revient de communiquer auprès de ses hôtes et expliquer la baisse de prix. Pas à un discounter virtuel qui en plus de pratiquer des méthodes commerciales façon « grande braderie », dématérialise la relation humaine.
La vraie modernité n’est pas là où le Net pose ses leurres. Le Web n’est pas un apporteur d’affaires mais un mauvais « go between » puisqu’il charrie une clientèle qui n’est pas rentable.
En se jetant à bras le corps dans la ronde aux cyber-promotions, sous couvert de modernité, le Net s’avère un fossoyeur de business.
Francis Luzin
Directeur de la publication