
L’appellation « basquaise » ou « à la basquaise » ne concerne que quelques plats mais se rencontre pourtant d’un bout de la France à l’autre grâce à la recette emblématique du poulet basquaise. Mais qui dit basquaise implique certaines règles qui sont souvent transgressées.
Traditionnellement, l’ingrédient indispensable qui signe l’appellation « basquaise » est un piment doux vert très long et étroit de production maraîchère autochtone, dit localement « piment d’Anglet » ou « piment des Landes », ou encore « piment du Pays basque et du Seignanx (province des Landes) ». Sous cette dernière dénomination, une demande d’obtention d’IGP est en cours mais a déjà obtenu un Label Rouge le 1er septembre 2016 sous le vocable « biper eztia » (ce qui signifie piment doux en basque, « eztia » signifiant aussi « miel »). Trois variétés locales sont admises : errobi, aturri et errekaldea. Ces piments sont utilisés cueillis verts, avant rougissement (même si on peut les utiliser rouges dans d’autres préparations). Ils sont à l’étal de mai à octobre. Ils font partie de la grande famille des pipers, mot latin pour désigner les plantes qui ont une saveur poivrée (biper en basque) et ce sont donc eux qui ont donné leur nom à la fameuse piperade (logiquement, on devrait d’ailleurs dire biperade en basque mais c’est le nom français qui prévaut), base de l’appellation basquaise.
La piperade : aux couleurs du Pays basque
La piperade est une fondue à base de ces piments doux verts associés à des oignons et des tomates, trois ingrédients qui rappellent les couleurs du drapeau basque : l’ikurriña. Elle est relevée d’une pointe de piment d’Espelette, un autre piment du Pays basque, rouge et fruité, qui s’utilise séché et moulu. Surtout, les légumes sont longuement cuits, presque confits. On peut déguster la piperade telle quelle avec des tranches de jambon cru de pays (Bayonne) frites et des œufs. Presque chaque village a son rituel, certains mêlant les œufs battus à la piperade en fin de cuisson, d’autres y creusant plutôt des nids pour y casser les œufs.
C’est l’utilisation de cette piperade dans une recette qui autorise son appellation « basquaise » ou « à la basquaise », comme dans ces plats locaux : thon grillé à la basquaise et le fameux poulet basquaise. Mais on peut alors – ce n’est pas obligatoire mais vivement recommandé – y ajouter du jambon cru de pays : d’abord le gras que l’on fait fondre avant les légumes, puis le maigre avec les oignons.
À propos de matière grasse, signalons qu’autrefois, on utilisait de la graisse de confit de canard alors qu’aujourd’hui on utilise plutôt de l’huile d’olive, sous l’influence de la toute proche Espagne.
Le poulet basquaise : si ce n’est toi, c’est donc ton frère !
Or, il faut bien dire que ce piment doux vert se trouve très difficilement hors du païs. Raison pour laquelle ailleurs, on retrouve cette recette quasiment toujours faite avec des poivrons verts. Quand il n’y en a pas aussi des rouges, voire d’autres ingrédients plus fantaisistes tels qu’olives ou champignons ! Préparer le poulet basquaise avec des poivrons verts n’est donc qu’un ersatz.
Vous me direz, le poivron fait aussi partie de la famille des « bipera », ce que son nom à consonance poivrée rappelle. Car lui aussi est doux, ne contenant pas de capsaïcine mais seulement de la pipérine. Ce n’est donc qu’une demi-trahison. Mais comme chacun sait, on n’est jamais trahi que par les siens !
Certes. Mais l’on est chauvin au Pays basque comme ailleurs – non, j’ n’ai pas dit plus ! – et un bon poulet basquaise, c’est un beau poulet fermier (ça va de soi) et des piments doux verts locaux. Qu’on se le dise !
Blandine Vié