
C’est avec tristesse que nous vous faisons part du décès d’Alain Senderens, qui s’est éteint dimanche 25 juin dans sa maison en Corrèze à l’âge de 77 ans. Triplement étoilé pendant près de 30 ans, il faisait partie des plus grands chefs français.
Il avait d’abord dirigé l’Archestrate, devenu depuis l’Arpège et situé rue de Varenne à Paris, puis le Lucas Carton, près de la place de la Madeleine. Connu dans le monde entier pour sa passion des accords parfaits mets & vins, Alain Senderens avait également fait parler de lui en 2005. Cette année-là, il avait en effet décidé de renoncer aux trois étoiles que le Guide Michelin lui accordait depuis 1978 afin de créer un nouveau restaurant plus simple et plus abordable, baptisé Senderens.
Figure de la Nouvelle Cuisine, Alain Senderens était également connu pour ses associations sucrées-salées et pour avoir exhumé de vieilles recettes telles que le Canard Apicius rôti, datant de l’époque romaine, ou encore le Homard à la vanille.
Le chef avait rendu son tablier en 2013.
« En 1993, j’étais commis auprès du chef étoilé José Martinez », se souvient Nicolas Sale, Chef exécutif du Ritz Paris (La Table de l’Espadon**, Les Jardins de l’Espadon*). « Un jour, il nous a tous invité avec les pourboires à aller manger chez Alain Senderens. Quand j’ai gouté sa cuisine, je me suis dit "c’est exactement ça que j’ai envie de faire ! " Des années plus tard, je me souviens encore parfaitement de ce repas… Puis, j’ai intégré sa brigade et j’ai tout de suite ressenti un esprit sportif : tout le monde travaillait ensemble pour un but commun : la satisfaction du client et l’excellence. Ce fut un vrai déclic de travailler avec un chef qui a marqué l’histoire de la cuisine en prenant notamment des risques. Il fut le premier à créer des associations mets-vins, à proposer une cuisine attentive au bien-être, à réfléchir sur les équilibres culinaires. Il a inspiré la Nouvelle Cuisine et a formé une multitude de chefs qui sont devenus, par la suite, connus et reconnus. Je n’ai passé que deux ans à ses côtés mais je me suis inspiré de lui longtemps avant de découvrir ma propre identité. Je me souviens des analytiques que nous faisions l’après-midi. Il nous demandait de faire des essais en cuisine, quelle pression… Puis, il les goûtait avec devant lui des verres de vins alignés. D’une précision redoutable, il testait tous les millésimes jusqu’à temps qu’il trouve l’accord parfait ! Cela pouvait durer des heures. En 1990, il avait déjà le fonctionnement d’un cuisinier de 2017. Il analysait, analysait et analysait. C’était un monument. »