
Après le choc de l’annonce, comment organisez-vous votre quotidien ?
Arnaud Donckele : Comme beaucoup de mes confrères je pense ! C’est une immersion singulière entre la vie familiale et un mode de travail nouveau pour nous les cuisiniers : le « télétravail ». En ce moment, nous nous penchons sur les « business plan », la stratégie à adopter. Nous réfléchissons à la réouverture, à « l’après » et organisons des réunions à distance. Tout ceci est assez éloigné de mon travail quotidien de cuisinier, mais le propre de cette crise est de nous pousser à nous adapter ! Le soir, je prends le temps aux côtés de ma famille, néanmoins tout me paraît beaucoup plus long. Cela est certainement dû au fait d’être confiné, accentué par un silence plus marqué à l’extérieur. Nous nous recentrons sur l’essentiel aussi : davantage de coups de téléphone, de messages à nos proches, à nos équipes et aux personnes que nous aimons. Nous accordons enfin plus de temps à la lecture et à la cuisine avec mon fils cadet. Pour moi, ce sont des moments privilégiés.
Envisagez-vous de modifier l’offre de vos restaurants ?
Nous avons beaucoup réfléchi sur ce sujet, tellement de choses risquent de changer ! Nous nous sommes mis d’accord pour réduire la voilure par rapport à ce qui était prévu initialement. Évidemment, nous serons impactés par la reprise très lente de l’économie. Nous préfèrerons donc opter pour un service réduit à la Vague d’Or en envisageons d’ouvrir la table gastronomique 5 jours par semaine au lieu de 7, en réduisant peut-être aussi légèrement le nombre de plats proposés.
Nous pensons, pour le moment, qu’il faut rassurer nos hôtes. Notre première réflexion s’est naturellement tournée vers nos habitués. Ils nous ont adressé leurs souhaits de pouvoir retrouver tel ou tel plat, telle ou telle chambre pour les clients de L’hôtel. Cela a naturellement influencé nos décisions. Nous allons essayer de rester un lieu qui les rassure, un lieu réconfortant et donc le plus proche possible d’avant la crise.
Tribune libre
Chaque matin, lorsque je contemple depuis ma fenêtre la rue vide et silencieuse, je reste encore surpris par cette situation complètement irréelle. Une image du confinement m’a profondément marqué : celle de canards sauvages qui tranquillement se dandinaient dans ma rue pour aller en direction d’un boulevard. Cela m’a procuré une grande joie. En ce moment, la nature reprend sa juste place. J’ignore si demain le monde changera. Mais une chose est certaine : il sera d’une importance capitale de bien gérer le lien avec nos entourages personnels et professionnels, car l’avenir sera très difficile. Beaucoup de choses vont évoluer et il faudra selon moi capitaliser au maximum sur l’humain. Si j’essaie d’avoir une note positive dans cette situation aussi triste que singulière, c’est la remarquable prise de conscience de l’importance stratégique de nos producteurs, pas seulement pour notre pays mais pour le « bien manger » universel de demain.